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vendredi 25 août 2006

Dessein idiot

Un des nouveaux marronniers lassants est la faiblesse de la Théorie de l'évolution aux USA. Ce qu'on mentionne moins est la campagne hors des USA pour les suivre sur cette voie des miracles perpétuels et de l'occasionnalisme. L'année dernière, un sondage disait qu'il n'y avait que 26% des Américains à croire à la théorie (40% chez les personnes diplomées). L'étude publiée récemment donne un chiffre plus élevé (40% contre 80% en Europe de l'Ouest ou au Japon), peut-être parce que la question a été posée différemment (Evolution ou Evolution par sélection naturelle).

Malgré l'article optimiste (et un peu vide) de Walter Mead (qui oppose des mouvements néo-évangéliques, plus "ouverts", aux fondamentalistes sur le déclin), ce rôle de la religion sur la science a peu d'équivalent dans le monde industrialisé, à part peut-être en Pologne et en Turquie, qui avaient aussi de fortes opposition à l'évolution. Mencken n'a décidément servi à rien...

La sélection repose sur des hasards et l'adaptation (ou "exaptation" pour faire moins téléologique). C'est peut-être pourquoi les anti-darwiniens se servent à présent de "coïncidences" contre la science et assurent qu'elles n'ont pas de signification plus globale, en une paradoxale inversion des arguments.

Par une anomalie étrange, le Département américain de l'éducation a retiré ("par inadvertance") la biologie de l'évolution des sujets d'étude qui donnent droit à une bourse.

Le fait que le fringant Benoît XVI rejoigne la cabale des néo-créationnistes en virant (ou "en poussant à la retraite") le Jésuite George Coyne, 73 ans, ne va pas aider. Le Père Coyne avait osé contredire le cardinal Schönborn et s'était borné à dire que ce créationnisme ne pouvait avoir aucun intérêt en tant qu'hypothèse scientifique.

En bon jésuite, le successeur de Coyne, l'astronome Funes (qui doit avoir de la mémoire) a prudemment refusé de "s'exprimer sur les questions de biologie" mais a nié que Coyne ait été renvoyé de l'Observatoire du Vatican.

C'est juste une coïncidence que cela arrive en même temps qu'un séminaire d'été de Ratzinger où il se dit intéressé par ce néo-créationnisme d'origine protestante. Schönborn prétend à présent qu'il ne voulait critiquer que des utilisations "idéologiques" de Darwin en défendant la scientificité de l'Intelligent Design. Voir une religion dénoncer un risque de fétichisme idéologique a toujours quelque chose de piquant.

Edit : Toute personne qui tentera de défendre le néo-évangélisme comme raisonnable sera condamnée à porter ces pyjamas de Croisés (je sais que vous en voulez un, avouez-le).

California Rest in Peace Simultaneous Release

Je dois être vraiment lent, mais je ne comprends pas bien la force de ces arguments en faveur du nouveau système proposé pour les élections présidentielles en Californie.

California Senate Backs Plan to Give Electoral Votes to Popular Vote Winner

Sacramento - California would cast its 55 Electoral College votes for the winner of the national popular vote under a bill designed to change the way the president is elected and increase the state's influence in national elections.

The bill, approved Tuesday by the Senate, would help draw candidates to the nation's most populous state for intensive campaigning, said Sen. Debra Bowen, D-Redondo Beach, who carried the bill in the Senate.

Oui, il y a de nombreux arguments qu'on peut trouver contre le Collège Electoral (système qui n'existait que pour avantager les esclavagistes et aujourd'hui le Flyover Country). Et affaiblir le Collège implique que le vote populaire soit plus pris en compte. Mais le système proposé en Californie (et également au Colorado, Illinois, Louisiane et Missouri) continue d'être un système majoritaire "Le Gagnant Prend tous les votes" qui laisse décider le reste du pays. Cela augmente l'importance du suffrage direct (et donc en partie des Etats très peuplés) sans supprimer le Collège des Grands Electeurs, mais il n'est pas évident que cela donnerait nettement plus d'importance aux électeurs californiens, même si c'est l'Etat le plus peuplé.

Pourquoi la Californie compte-t-elle relativement peu en ce moment dans les campagnes présidentielles ? Seulement parce qu'elle vote assez solidement démocrate depuis 1992 (54,3% pour Kerry en 2004) . Bush comme Kerry préféraient investir sur les "champs de bataille". Si elle était aussi également divisée que le Wisconsin mais avec deux fois plus de Grands Electeurs que la Floride, les candidats y dilapideraient leurs fortunes au lieu de se concentrer sur l'Ohio.

Avec ce système par exemple, cela n'aurait rien changé en 2000, mais Bush aurait obtenu en 2004 les 55 votes de la Californie (si du moins on croit vraiment qu'il a obtenu les 50,7% qu'on lui attribue malgré les quelques tricheries en Floride et en Ohio). Cela aurait donné 341 Electeurs contre 197 (ceteris paribus, en supposant qu'un nombre suffisant des autres Etats n'aient pas adopté le même système, ce qui est en fait impossible).

Mais après tout, ce ne doit pas être un si mauvais procédé puisqu'il déplait aux Républicains. Ils se drapent dans la Constitution mais redoutent surtout à plus long terme une contamination qui affaiblit le rôle de quelques gros Swing States comme l'Ohio, la Floride et la Pennsylvanie et surtout des Etats peu peuplés, en majorité conservateurs (à part quelques-uns de Nouvelle-Angleterre comme Maine, Vermont).

En revanche, un système vraiment proportionnel aurait pour effet de diluer le rôle d'un Etat et c'est la raison pour laquelle aucun ne l'adopte. Le Colorado l'avait proposé en 2004 par référendum mais ce fut refusé à 66%. Aucun Etat ne va passer un tel "désarmement unilatéral" qui amoindrirait son propre rôle tant que les autres ne le suivent pas. Si le système avait été utilisé en Californie en 2000, Gore n'aurait eu que 29 Electeurs au lieu de 54 (Bush 23 et Nader 2), en 2004 Kerry aurait eu 31 Electeurs au lieu de 55 (Bush 24).

Il y a une solution mixte plus complexe, celle du Maine (4 Electeurs) et du Nebraska (5 Electeurs). Chaque Etat a un nombre de Grands Electeurs égal à ses Sénateurs (2) + le nombre de Circonscriptions de Représentants. Les Electeurs sont comptés à la majoritaire dans chaque circonscription mais les deux restants sont accordés au gagnant du vote sur tout l'Etat. En pratique, cela ne donne aucune différence dans ces petits Etats à 4-5 Grands électeurs, mais dans des Etats plus peuplés cela augmenterait l'importance des circonscriptions.

Comme le fait souvent remarquer The Economist, cela augmente encore le rôle du charcutage électoral, déjà décisif aux USA. Et de toute manière cela n'empêcherait pas un candidat minoritaire en voix d'avoir la majorité des circonscriptions.

Mais tout cet "Agreement Among the States to Elect the President by National Popular Vote" n'a encore qu'un intérêt théorique.

Même si les citoyens considéraient en majorité que ces révisions du Collège doivent être appliquées, il faudrait d'abord qu'assez d'Etats représentant la majorité des Etats des Grands Electeurs (au moins 270) la fassent passer, ce qui n'arrivera probablement pas - sauf si on a une nouvelle anomalie qui crée un accord "bipartisan" contre le Collège [édité, cf. commentaires].

Il est vrai qu'il faut bien commencer quelque part et que cet accord entre Etats qui contourne la difficulté du Collège électoral a l'intérêt de faire passer de l'improbable au peu probable la révision.

Les conservateurs pourront toujours faire remarquer que les autres systèmes électoraux n'évitent pas non plus des résultats idiots.

Le Royaume-Uni a eu le cas des élections de 1951 où les Tories ont gagné ces majoritaires à un seul tour, alors que les Travaillistes les avaient battus de 1,3 million de voix.

Et nous serions mal placés pour défendre notre majoritaire à deux tours, avec un Président royalement élu et qui aurait pourtant très bien pu perdre au second tour si le bipartisme fonctionnait. Rien n'empêcherait par exemple dans nos présidentielles relativement dispersées qu'une très forte majorité vote pour une foule de petits candidats "centristes" et que le second tour se déroule quand même entre Marine Le Pen et Arlette Laguiller (ou plutôt une de ses successeurs "démocratiquement désignées" par Hardy comme Isabelle Bonnet, Farida Megdoud ou Valérie Hamon). Même le système préférentiel comme celui de l'Australie ne peut éviter tous les paradoxes (et sans doute la tendance au Bipartisme a un certain avantage rationnel pour minimiser ces problèmes).

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